jeudi 30 décembre 2021

L'abjuration collective à La Motte d'Aigues (23 et 29 octobre 1685)

 


Pour cette abjuration, je m’étais basé jusqu’à présent sur la transcription de Chantal CORBIÈRE, publiée dans La Valmasque, n° 53, pp 6-9 (1999), reprise et complétée par Suzanne RÉAL dans La Valmasque, n° 67, pp 34-36 (2005). Le travail paraissait de bonne qualité, mais j’avais noté quelques anomalies qui méritaient vérification. Les Archives Départementales de Vaucluse ayant eu l’obligeance – et je les en remercie grandement – de me faire parvenir les images des originaux, j’ai pu transcrire directement les actes d’abjuration, en reporter le contenu dans un tableau et noter les renseignements utiles dans ma base de données des familles protestantes provençales.

Dans l’ensemble, les contributions de Chantal CORBIÈRE et de Suzanne RÉAL étaient très correctes, mais j’ai constaté malgré tout quelques erreurs d’interprétation. Il faut dire que ma bonne connaissance des familles en amont et en aval de cette date d’octobre 1685 a facilité mon travail. Au total, ce sont donc 206 personnes qui ont abjuré la foi protestante, principalement le 23 octobre 1685 et quelques-uns plus tard, le 29.


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dimanche 26 décembre 2021

L’abjuration collective à Peypin d’Aigues, le 23 octobre 1685


 

Pour cette abjuration, je m’étais basé jusqu’à présent sur la transcription de Suzanne RÉAL, publiée dans La Valmasque, n° 35, pp 17-21 (1993). Le travail paraissait de bonne qualité, mais j’avais noté quelques anomalies qui méritaient vérification. Les Archives Départementales de Vaucluse ayant eu l’obligeance – et je les en remercie grandement – de me faire parvenir les images des originaux, j’ai pu transcrire directement les actes d’abjuration, en reporter le contenu dans un tableau et noter les renseignements utiles dans ma base de données des familles protestantes provençales. 

Dans l’ensemble, la contribution de Suzanne RÉAL était très correcte, mais j’ai constaté malgré tout quelques erreurs de lecture. Il faut dire que ma bonne connaissance des familles en amont et en aval de cette date d’octobre 1685 a facilité mon travail. Au total, ce sont donc 199 personnes qui ont abjuré la foi protestante (et non 200 comme l’avait indiqué Suzanne RÉAL, une personne apparaissant en double). Notons que parmi ces abjurants, un nombre non négligeable de familles furent touchées par le départ au Refuge dans les années qui ont suivi la Révocation.


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mercredi 22 décembre 2021

Quand parrain et marraine sont des malsentants de la foi

Le vicaire perpétuel de Cabrières d’Aigues se fait berner à deux reprises en peu de temps.

Le 31 décembre 1730, il baptise une enfant et admet comme parrain le sieur Dominique Savornin. Mais le même jour, il ajoute dans son registre :
Ayant apris que le Sr Dominique Savornin, que j’ay cru estre ancien catholique en l’admettant pour parrain, estoit de la religion prétendue refformée, et qu’ainsi j’ay esté trompé, j’ay formé la résolution de ne jamais admettre aucun étranger sans qu’il ait exibé d’abor un certificat de monsieur son vicaire, come quoy il est ancien catolique et a fait son devoir pascal.
En effet, Dominique Savornin est issu d’une lignée de notables protestants de Lourmarin. Famille très connue dans le Luberon, et il est surprenant que le curé n’ait pas subodoré qu’il avait bel et bien affaire à un “nouveau converti” mal-sentant de la foi…
Quelque temps plus tard, le 12 avril 1733, il baptise un enfant et admet comme marraine sa tante, Catherine Arbaud (qui signe l’acte de baptême). Mais six jours plus tard, il note dans son registre :
Comme j’ay appris que Catherine Arbaud, qui m’avoit asseuré être véritable catholique romaine pour pouvoir estre marraine de son neveu, m’a trompé, et qu’elle ne fait que se contrefaire, je proteste de ne plus vouloir d’étranger qui ne porte un certificat de monsieur son curé comme quoy il est apostolique romain et a fait son devoir pascal.
Catherine Arbaud est en effet issue, comme la mère de l’enfant, d’une grande famille protestante de Manosque. Quelques-uns des neveux et nièces de ces sœurs finiront même par gagner le Refuge : on les retrouve à Lausanne à la fin de l’année 1740.
Reste à savoir si le curé a pu obtenir par la suite le fameux certificat qu’il se promet – à deux reprises – de réclamer !




lundi 13 décembre 2021

Livre : Le printemps des maudits (Jean Contrucci)

 


Je me méfie des romans historiques qui portent sur l’histoire des vaudois. J’en ai lu beaucoup de très mauvais, ayant une qualité littéraire limitée et une intrigue contestable. Aussi, j’ai commencé la lecture du livre de Jean Contrucci, Le printemps des maudits, avec une légère réticence.

Mais je dois dire qu’au-delà de l’intrigue romanesque – qui ne m’intéresse pas dans ce commentaire –, la trame historique est bien respectée parce que bien renseignée. Jean Contrucci s’est en effet appuyé sur les publications faites par Gabriel Audisio relatives à la semaine sanglante de l’exécution de l’Arrêt de Mérindol, notamment Procès-verbal d’un massacre (Édisud, 1992) et Histoire de l’exécution de Cabrières et Mérindol et d’autres lieux de Provence (AEVHL, 1982, réédition Les Éditions de Paris – Max Chaleil, 1995). Il mentionne aussi le livre de Maurice Pezet, L’épopée des vaudois (Seghers, 1976), qui m’avait accompagné durant tout l’été 1976 et qui m’avait initié à l’histoire des vaudois.

Dans Le printemps des maudits, la chronologie des événements est précise, les acteurs bien identifiés, la progression des exactions bien respectée. Jean Contrucci a de surcroît la délicatesse de ne pas s’étendre sur la description des abominations commises par la soldatesque. Il indique en revanche les résultats désastreux de cette “croisade” :

« Le comptage sur le terrain fait état de 9 villages entièrement détruits, dont on a fait table rase, 18 pillés de fond en comble, 763 maisons ruinées et on estime à près de 3000 le nombre de morts, si l’on prend en compte ceux de Cabrières. » (p 332) 

Tout cela pour un Arrêt qui ne concernait initialement que 19 individus…

Voyons plus précisément ce que Jean Contrucci écrit à propos de Lacoste, où vivait à cette époque la famille de mon aïeul direct Estienne Appy :

« Dans l’après-midi même du jour du sac de Cabrières, Baudoin, un de ses capitaines [de Maynier d’Oppède], en compagnie de Labbé, qui sert chez le sieur de Loubières, s’attaquaient de son propre chef au village de La Coste, au prétexte qu’on leur aurait rapporté que s’y trouvaient des luthériens réfugiés. Or, La Coste n’est en rien concerné par l’édit de Mérindol (…). Les habitants, effrayés de voir ces troupes déferler sur leur village perché, en avaient fermé les portes dans le dos de leur jeune seigneur, François de Simiane sorti parlementer pour qu’on épargne son fief. Cette porte claquée au nez des assaillants valut aux villageois un assaut en règle et semblables pillages et tueries qu’en la malheureuse Cabrières. On y a vu des mères disputant leurs filles aux violeurs, leur jeter des couteaux, aux fins de se percer le sein plutôt que subir un déshonneur. Si le carnage commencé s’est bientôt tari, c’est grâce à l’arrivée sur place des trois commissaires de l’exécution, prévenus qu’il se passait à La Coste des choses inadmissibles. » (pp 288-289)

Les soldats de Provence arrivèrent en effet à Lacoste le mardi 21 avril 1545. Voici, fait par Jacques Aubéry, le récit des exactions commises le lendemain, après que les portes de la place furent ouvertes à la demande de Maynier d’Oppède :

« On ouvre la porte. Incontinent, cette troupe de gendarmes s’épand par la ville, fait des maux infinis, met le feu par les maisons et aux étables du château, pille et emmène les chevaux du seigneur, des femmes et des filles sont prises et emmenées dans un verger et dans une garenne derrière le château, forcées, pillées et rançonnées, leurs bourses coupées ; les mères tenaient leurs filles que les soldats arrachaient de leurs mains pour les violer ; les filles criaient et priaient les soldats de les tuer plutôt que de les déshonorer ; la mère baillait le couteau à sa fille pour se tuer et pour mourir chaste plutôt que de vivre souillée. Ils prirent une jeune femme pour la forcer tenant son enfant dans les bras et jetèrent l’enfant dans la garenne. Un témoin dit une chose horrible : qu’une femme pour ne pas être violée se jeta du haut en bas de la muraille de la ville et demeura en bas jusques au soir comme morte ; ces soldats vont la trouver et la connaissent charnellement demi-morte. Un autre dit qu’ils forcèrent des filles fort jeunes, voire de l’âge de 8 à 9 ans, et qu’ils mirent le feu à une grange du sieur de La Coste dont furent brûlées deux femmes. Deux autres femmes, d’horreur de voir ainsi traiter leurs filles, se pendirent pour s’étrangler, ce que Dieu ne permit pas parce que les cordes rompirent. »

À la lecture de ces témoignages, on est saisi d’horreur. Il est donc miraculeux que mon ancêtre et sa famille aient échappé à ce carnage. Sa descendance – qui porte toujours son nom – est heureusement encore là pour en témoigner…

En conclusion, Jean Contrucci a fait un travail de recherche sérieux et son livre Le printemps des maudits est à lire pour qui veut en savoir davantage, sans pour autant se référer aux documents d’époque écrits dans une langue parfois peu accessible aux néophytes.