Pendant toute la période du Désert, j’ai relevé
dans les registres paroissiaux catholiques les actes de baptêmes, mariages et
sépultures concernant les descendants de familles protestantes. À Mérindol, les
abjurations d’octobre 1685 concernaient un total de 790 personnes. Les
déclarations consécutives à l’édit de Tolérance de 1787 concernent quant à
elles 619 personnes. Malgré cette baisse dans les effectifs, on peut dire que
la communauté protestante de Mérindol a bien résisté pendant toute la période
du Désert. Si les actes catholiques concernant la population sont nombreux
après la Révocation, leur nombre baisse drastiquement à partir des années 1740
qui correspondent à l’arrivée des premiers pasteurs clandestins formés au
séminaire français de Lausanne fondé par Antoine Court. À preuve la présence du
pasteur Jean Bétrine qui est connu pour être le premier pasteur formé à ce
séminaire. Par la suite, on trouve essentiellement des déclarations de
sépulture qui permettaient aux protestants d’officialiser les décès de leurs
proches, notamment peu de temps avant leur mariage. Cela dénote qu’à Mérindol,
il y avait une forme de tolérance qui n’existait pas dans les paroisses
alentours, notamment à Lourmarin où l’affrontement semble avoir été beaucoup
plus rude. En effet, dans les années qui suivent la Révocation, les registres
paroissiaux ne parlent pas comme ailleurs de “nouveaux convertis” ou de
“religionnaires”. Les refus de sépulture sont exceptionnels. Il arrivait assez
souvent que les pères n’assistent pas au baptême catholique de leur enfant. Ces
baptêmes se célébrant avec quelques jours de retard sur la naissance, les
parrains et marraines ont mis du temps avant d’être choisis parmi d’anciens
catholiques comme le voulait la règle. Deux ou trois familles seulement étaient
réellement passées au catholicisme avant la Révolution. Les autres ont gardé
leur foi d’origine durant le siècle qu’a duré la période du Désert…
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